ETHIQUE et DEONTOLOGIE

 

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UNR - PACA

Master 1 - GESS - 2008
1 - TEXTES
R. Misrahi : Spinoza
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  • Deux extraits de SPINOZA

« La plupart de ceux qui ont écrit sur les affects et sur les principes de la conduite semblent traiter non de choses naturelles qui suivent des lois générales de la nature, mais de choses qui sont en dehors de cette Nature. Il semble même qu'ils conçoivent l'homme dans la Nature comme un empire dans un empire. Ils croient en effet que, loin de le suivre, l'homme perturbe l'ordre de la Nature et que, dans ses propres actions, il exerce une puissance absolue et n'est déterminé que par lui-même. Aussi attribuent-ils la cause de l'impuissance et de l'inconstance humaines non pas à la puissance générale de la Nature mais à je ne sais quel vice de la nature humaine sur laquelle, dès lors, ils pleurent, rient, exercent leur mépris ou, le plus souvent, leur haine. Et celui qui sait accabler l'impuissance de l'Esprit humain avec le plus d'éloquence ou le plus d'arguments passe pour divin. (…)
Mais voici mes raisons. Il ne se produit rien dans les choses qu'on puisse attribuer à un vice de la Nature ; car elle est toujours la même, et partout sa vertu, sa puissance d'agir est une et identique ; c'est-à-dire que les lois et les règles de la Nature selon lesquelles tout se produit et se transforme sont toujours et partout les mêmes, et c'est aussi pourquoi, quelle que soit la nature de l'objet à comprendre, on ne doit poser qu'un seul et même principe d'explication : par les lois et règles universelles de la Nature. "

SPINOZA : Éthique, III, Préface.

Ne pas tourner en dérision, ne pas déplorer mais comprendre.
Les philosophes conçoivent les affections qui se livrent bataille en nous, comme des vices dans lesquels les hommes tombent par leur faute, c'est pourquoi ils ont accoutumé de les tourner en dérision, de les déplorer, de les réprimander, ou, quand ils veulent paraître plus moraux, de les détester. Ils croient ainsi agir divinement et s'élever au faîte de la sagesse, prodiguant toutes sortes de louanges à une nature humaine qui n'existe nulle part, et flétrissant par leurs discours celle qui existe réellement. Ils conçoivent les hommes en effet, non tels qu'ils sont, mais tels qu'eux-mêmes voudraient qu'ils fussent : de là cette conséquence, que la plupart, au lieu d'une Ethique, ont écrit une Satire, et n'ont jamais eu en Politique de vues qui puissent être mises en pratique ; la Politique, telle qu'ils la conçoivent, devant être tenue pour une Chimère, ou comme convenant soit au pays d'Utopie, soit à l'âge d'or, c'est-à-dire à un temps où nulle institution n'était nécessaire. Entre toutes les sciences, donc, qui ont une application, c'est la Politique où la théorie passe pour différer le plus de la pratique, et il n'est pas d'hommes qu'on juge moins propres à gouverner l'État, que les théoriciens, c'est-à-dire les philosophes.

SPINOZA : Traité politique, chap. 1, §1.

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